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Avec son Postulat 12.3641 le conseiller aux États Raphaël Comte a demandé des conditions-cadres pour les pratiques des sociétés de recouvrement. Dans son rapport en réponse au postulat, le Conseil fédéral a conclu qu’il appartenait aux tribunaux de se prononcer sur le montant des frais mis à la charge des débiteurs.
Près de dix ans plus tard, les problèmes soulevés à l’époque persistent et sont de plus en plus nombreux. La Fédération romande des consommateurs constate une augmentation massive des plaintes (une par jour en moyenne en 2020) en lien avec les sociétés de recouvrement. Celles-ci exigent presque systématiquement des frais exorbitants ; elles s’appuient sur l’article 106 CO, mais ne justifient pas le dommage prétendu et facturé.
Les frais de traitement supplémentaires demandés augmentent encore plus la facture et sont sans commune mesure avec le travail de traitement fourni. L’instance de recours mise en place par l’Association suisse des instituts fiduciaires de recouvrement (VSI) se garde bien de remettre en question le thème central des frais de recouvrement : Il publie plutôt une liste de frais forfaitaires en fonction du montant réclamé.
Outre des frais excessifs, les sociétés de recouvrement ont recours à des pratiques de plus en plus douteuses et agressivesIls envoient constamment des rappels, même si la dette n’est pas due ou qu’elle n’atteint pas le débiteur réel ; ils augmentent très rapidement les montants exigés jusqu’à ce que les personnes concernées capitulent ; ils menacent de les inscrire dans des bases de données de solvabilité, etc. Sous cette pression et pour éviter les ennuis, les personnes ainsi sollicitées paient même si elles contestent devoir ces montants. L’intervention du tribunal reste théorique, car de nombreuses personnes n’ont pas les moyens personnels ou financiers d’agir en justice. Il est donc important de prendre des mesures pour mettre un terme à ces pratiques.
1. quand le Conseil fédéral prévoit-il de créer une Modification de la loi qui encadre l’ensemble des activités des sociétés de recouvrement et détermine clairement leur position ?
2. plusieurs pays voisins ont un Procédure d’autorisation ou sur le site Peine encourue interdit la perception de frais de recouvrement. Quelles mesures le Conseil fédéral envisage-t-il pour mettre un terme efficace aux pratiques abusives, notamment en ce qui concerne les frais, les intérêts ou la pression exercée sur les débiteurs présumés ?
3. les avocats étrangers qui passent par des sociétés de recouvrement en Suisse sont-ils autorisés à facturer de prétendues amendes pour des infractions au droit de la circulation routière ? De tels procédés peuvent-ils faire l’objet de poursuites pénales ?
Avis du Conseil fédéral du 11.8.21
1./2. Dans son rapport “Conditions-cadres des pratiques des sociétés de recouvrement” du 22 mars 2017, le Conseil fédéral s’est prononcé, en exécution du Postulat Comte 12.3641 s’est intéressé de près aux méthodes des sociétés de recouvrement. Il a ainsi réalisé une étude approfondie Réglementation du secteur de l’encaissement (par ex. avec des procédures d’autorisation et des obligations de diligence contraignantes) jugée non proportionnelle et donc non justifiée au vu des moyens déjà existants. Le code des obligations, le droit pénal et le droit de la concurrence déloyale ainsi que le droit de la protection des données prévoient déjà des possibilités d’agir contre les pratiques inappropriées ou agressives des sociétés de recouvrement. Le rapport a notamment expliqué que les propres dépenses d’un créancier ou d’une société de recouvrement à laquelle il est fait appel ne peuvent être considérées comme un dommage résultant de la demeure au sens de l’art. 106, al. 1, CO (RS 220) et être répercutées sur le débiteur que dans des cas exceptionnels (rapport du 22 mars 2017, ch. 4.1). La notification d’un commandement de payer d’un montant élevé ou la menace de démarches juridiques comme moyen de pression pour obtenir le paiement de créances inexistantes ou impossibles à recouvrer peut constituer une contrainte (art. 181 CP, RS 311.0 ; voir par exemple les arrêts du Tribunal fédéral 6B_8/2017 consid. 2 et 6B_1074/2016 consid. 2.3). Une société de recouvrement qui donne des indications trompeuses ou mensongères sur ses propres possibilités juridiques se comporte de manière déloyale (art. 3, al. 1, let. b, LCD, RS 241). Enfin, la loi sur la protection des données (LPD, RS 235.1) contient des dispositions légales relatives au traitement des données qui s’appliquent également aux sociétés de recouvrement. La révision totale de la LPD, qui a été adoptée par le Parlement le 25 septembre 2020 (FF 2020 7639), renforce encore la protection des données. En résumé, le Conseil fédéral estime qu’il n’est pas nécessaire d’agir au niveau législatif, même si des cas problématiques semblent se présenter dans la pratique. (voir aussi les prises de position sur les mo. plats 17.3561 et 20.3689).
3) Dans la plupart des cas, les amendes de circulation étrangères ne sont pas exécutables en Suisse, faute de base conventionnelle. Les exceptions sont par exemple l’accord de police avec la France et l’accord trilatéral avec l’Autriche et le Liechtenstein, qui comprennent l’assistance à l’exécution des amendes entrées en force (art. 47 ss de l’Accord entre la Suisse et la France relatif à la coopération transfrontalière en matière judiciaire, policière et douanière du 9 octobre 2007, RS 0.360.349.1 ; art. 42 ss de l’Accord entre la Suisse, l’Autriche et le Liechtenstein relatif à la coopération transfrontalière en matière policière du 4 juin 2012, RS 0.360.163.1). La Convention de Lugano (Convention concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, RS 0.275.12) n’est en revanche pas applicable au recouvrement de créances à caractère pénal telles que les amendes de circulation et couvre tout au plus le recouvrement de taxes étrangères non payées pour l’utilisation de places de stationnement ou d’autoroutes.
Si les amendes routières ne sont pas juridiquement exécutables en Suisse, on peut se demander dans quelle mesure elles peuvent être recouvrées en Suisse. Si l’on fait croire au prétendu débiteur que la créance qu’il fait valoir est juridiquement exécutable ou si on le menace d’une poursuite, cela peut constituer un délit de contrainte (voir ci-dessus la réponse aux questions 1./2.).
De nombreuses voix s’élèvent pour dire que l’encaissement d’amendes de circulation étrangères en Suisse touche à la souveraineté suisse et constitue donc une infraction au sens de l’article 271, paragraphe 1, du code pénal (“actes interdits pour un État étranger”), à moins qu’une autorisation officielle ne soit disponible. On peut se demander dans quelle mesure une telle autorisation pourrait être accordée. En tout état de cause, les actes qui constituent l’infraction de contrainte susmentionnée ne pourraient pas être autorisés.